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Économie suisse: Un élève modèle qui s’égare?

Dans les comparatifs de compétitivité, la Suisse est toujours parmi les premiers de classe, ce qui lui vaut sa réputation d’élève modèle. L’acceptation de l’initiative populaire en faveur d’une 13e rente AVS, en mars dernier, a toutefois fait douter certains analystes de sa volonté de maintenir son rang. En même temps, le fait qu’on qualifie de plus en plus souvent l’Allemagne d’«l’homme malade» de l’Europe montre à quel point même les élèves modèles peuvent chuter rapidement.

À première vue, la Suisse fait figure d’exemple – en matière de croissance et d’exportations comme de politique budgétaire. Mais à deuxième vue, on décèle des défis et des risques. Par quelles mesures la politique économique locale, mais aussi chaque entreprise, peuvent-elles surmonter ces défis?

Cover image of UBS Outlook Schweiz Juillet 2024

Économie suisse: Un élève modèle qui s’égare?

La croissance suisse mise à l’épreuve

La Suisse tombe en arrière en matière de croissance par habitant

PIB par habitant, index 2000 = 100

Importance élevée de la résilience
Sources: OECD, UBS
  • Depuis 2000, la Suisse a enregistré une croissance réelle cumulée de près de 50%, tandis que la zone euro ne progressait que d’un peu plus de 30%. Les États-Unis ont fait légèrement mieux, avec une croissance cumulée de près de 55%.
  • Mais la Suisse a perdu de son avance en comparaison internationale. Si le PIB par habitant a augmenté de plus de 20% depuis le début du millénaire – dépassant ainsi la croissance dans la zone euro –, en Allemagne, ce chiffre approche les 25%; aux États-Unis, il dépasse 30%.
  • Malgré la forte participation au marché du travail, il existe encore du potentiel d’amélioration dans ce domaine pour l’économie suisse; ainsi, le taux d’activité des travailleurs âgés est relativement bas en comparaison internationale, et le travail à temps partiel est en moyenne plus répandu. À environ 12%, le taux d’activité des personnes de 65 ans et plus en Suisse est deux fois moins élevé qu’aux États-Unis. Par ailleurs, la Suisse affiche le deuxième taux le plus élevé de travail à temps partiel parmi les pays de l’UE.

Une croissance dynamique des exportations?

Densité de start-ups relativement élevée en Suisse

Nombre de start-ups comparé à la population en million (16 à 64 ans), 2023

Les cyberattaques, un risque important
Sources: Dealroom.co, Nations Unis
  • Les exportations suisses de marchandises ont connu une évolution solide au cours des vingt dernières années, malgré la force du franc. Un regard attentif sur les différents secteurs montre que l’industrie pharmaceutique est le principal moteur de cette croissance.
  • La forte dépendance à l’égard des exportations pharmaceutiques soulève des questions sur les risques de concentration de l’économie suisse. Certes, les producteurs pharmaceutiques jouissent d’un avantage comparatif au niveau mondial grâce à leur expertise et leurs normes de qualité élevées, mais celui-ci s’amenuise. L’industrie pharmaceutique chinoise a rattrapé son retard et représente une sérieuse concurrence.
  • La Suisse doit miser sur l’innovation pour se maintenir face à la concurrence mondiale. Si l’on prend la densité des start-ups comme mesure de l’innovation, la Suisse s’en sort bien en comparaison internationale.
  • Il existe néanmoins un potentiel d’amélioration. Les nombreuses réglementations commerciales constituent un handicap pour l’industrie suisse, selon un rapport de BAK Economics.

L’évolution démographique comme grand défi

Politique fiscale suisse exemplaire au cours des dernières décennies

Dettes publiques en pourcentage du PIB (d'après la définition du FMI)

La main-d’œuvre qualifiée, un élément essentiel de la résilience
Sources: Macrobond, UBS
  • Le taux d’endettement en pourcentage du PIB a fondu de 52 en 2000 à 39% en 2022 en Suisse. Or durant cette période, la dette a doublé aux États-Unis.
  • La politique budgétaire de la Suisse devra toutefois faire face à des défis considérables dans les années à venir. La Suisse compte de plus en plus de retraités par rapport à la population active, et l’espérance de vie dans notre pays ne cesse d’augmenter. Cette dégradation du rapport retraités/actifs met l’AVS sous pression, d’autant qu’une population vieillissante entraîne une augmentation des dépenses de santé.
  • Si l’on veut empêcher que le niveau d’endettement augmente de manière dramatique, des mesures doivent être prises: soit augmenter les recettes, soit réduire les dépenses. Mais augmenter les recettes peut éroder le pouvoir d’achat des ménages. L’allongement de la durée de vie active soutien l’AVS mais n’entraîne pas nécessairement une réduction des coûts de la santé, qui impliqueraient de combiner différents leviers.
  • La Suisse peut conserver son statut d’exemple européen en matière de politique économique – à condition de prendre les mesures qui s’imposent. Une meilleure exploitation du potentiel du marché du travail et l’allongement de la durée de vie active soutiendraient le potentiel de croissance et la viabilité budgétaire. Optimiser la réglementation et renforcer les liens avec l’UE sont d’autres chantiers à envisager.
UBS Outlook Schweiz Juillet 2024

UBS Outlook Suisse Juillet 2024

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Economie et marchés financiers

Reprise l'année prochaine

  • La croissance suisse, en particulier l'industrie, devrait encore souffrir de la faible conjoncture dans la zone euro au cours du second semestre. Cependant, l'année prochaine, nous prévoyons qu'une reprise de la zone euro aidera l'économie suisse à revenir à une croissance autour de son potentiel. Nous prévoyons une croissance de 1,3 % pour l'année 2024 et de 1,5 % pour l'année 2025.
  • L'économie suisse devrait être soutenue cette année, comme l'année dernière, par une consommation solide et un marché du travail résilient. En 2025, cependant, la production industrielle et les investissements devraient gagner en importance. Les risques pour la conjoncture suisse restent une forte poussée des prix mondiaux et les diverses incertitudes (géo-)politiques.
  • Au cours des 12 prochains mois, l'inflation suisse devrait être influencée par plusieurs facteurs. D'une part, la relativement faible utilisation des capacités économiques conduit à une baisse de l'inflation, d'autre part, les effets de second tour font que l'inflation ne diminue que lentement. Nous prévoyons une inflation de 1,2 % pour l'année 2024 et de 1,0 % pour l'année 2025.

Une dernière baisse de taux en septembre

  • Après une deuxième baisse consécutive, le taux directeur de la BNS se rapproche désormais de sa valeur terminale. Nous prévoyons une dernière baisse des taux à 1,0 %, probablement en septembre, mais le moment exact dépendra probablement de l’inflation et du taux de change du franc suisse.
  • Bien que le potentiel de nouvelles baisses des taux de la BNS soit limité, nous pensons que la BCE et la Fed devraient accélérer l’assouplissement de leur politique monétaire dans les mois à venir. Nous nous attendons à ce que le CHF s’apprécie à la fois par rapport au dollar américain et à l’euro au cours des 12 prochains mois.
  • Comme les attentes du marché reflètent déjà un taux directeur de la BNS de 1,0% à la fin de l’année, nous ne voyons guère de potentiel pour une nouvelle baisse des rendements des obligations de la Confédération. Nous nous attendons à ce que les emprunts fédéraux à 10 ans se maintiennent autour de 0,7% sur les douze prochains mois.

Prévisions

Forecasts
Source: UBS

Autres publications: Retail Outlook 2024, PMI et l’enquête UBS CFA Society Switzerland

Retail Outlook 2024

  • Selon les estimations d’UBS, les ventes au détail nominales ont augmenté de 1,2% en glissement annuel en 2023. L’évolution positive du chiffre d’affaires s’explique principalement par la hausse des prix dans le commerce de détail (+2,9%). En conséquence, l’évolution des ventes corrigée des prix devrait avoir été négative (–1,7%). Cela signifie que le volume réel des ventes dans le secteur de la vente au détail a diminué – dans les secteurs alimentaire/near-food et non-alimentaire.
  • En 2024, les ventes au détail devraient augmenter de 1% en termes nominaux et enregistrer également une croissance positive, bien que faible, en termes réels (+0,3 %). Les hausses de prix devraient ralentir parallèlement à l’inflation des prix à la consommation.
  • La robustesse du marché du travail, le faible taux de chômage et la croissance démographique continueront de stimuler la consommation en 2024. La demande est freinée par les budgets tendus des ménages, confrontés à une forte hausse des primes d’assurance maladie (+8,7%) alors que les salaires réels n’augmentent que légèrement.

PMI Suisse : La reprise industrielle se fait attendre

  • L'indice des directeurs d'achat (PMI) de procure.ch est tombé de 46,4 à 43,9 points en juin. Le PMI reste en dessous du seuil de croissance de 50 points depuis 18 mois, indiquant une situation difficile pour le secteur industriel suisse.
  • Une réduction lente des stocks de produits finis et des PMI industriels faibles dans la zone euro ne laissent pas espérer une reprise rapide de l'industrie.
  • Le PMI des services est passé de 48,8 points le mois précédent à 52,0 points, indiquant à nouveau une légère croissance dans le secteur des services.

UBS CFA FMS: Politique intérieure comme principale préoccupation

  • L'indicateur UBS CFA Society Switzerland est resté stable en juin et indique un optimisme modéré des analystes financiers concernant la croissance économique suisse au cours des six prochains mois.
  • Les participants à l'enquête s'attendent à ce que le franc suisse continue de s'apprécier par rapport à l'euro et au dollar américain. Les attentes d'inflation à long terme restent stables, les analystes étant confiants que l'inflation suisse restera dans une fourchette de 0% à 2%.
  • Avant les élections en France et aux États-Unis, la politique intérieure est la plus grande préoccupation pour les États-Unis et la zone euro. En Suisse, la croissance économique constitue la principale préoccupation.