Quand il s’agit de la retraite, le logement joue pour beaucoup de Suisses un rôle central. On retrouve souvent au cœur des réflexions le souhait de rester le plus longtemps possible chez soi, dans un environnement familier, et de vivre sans craindre que le bail soit résilié un jour et sans se soucier d’avoir encore un loyer à payer. Et en effet, beaucoup semblent y parvenir. Mis à part les enfants qui vivent encore chez leurs parents, le taux de propriétaires est particulièrement élevé autour de l’âge de 65 ans (cf. graphique). Ce n’est qu’à partir de 75 ans que ce pourcentage diminue de nouveau, quand de plus en plus de seniors décident de se rendre en maison de retraite ou dans un logement locatif.
La viabilité: obstacle majeur
Toutefois, il existe aussi de nombreux cas où les personnes sont contraintes de déménager dans une location car le rêve initial de vieillir chez soi vole prématurément en éclats. En général, cela est dû à la combinaison d’une baisse de revenus et d’une hypothèque dont le montant est soit trop élevé, soit trop faible. Les raisons? Les fortes pertes de revenus sont en règle générale la cause des problèmes dont souffrent beaucoup d’actifs au moment de la retraite. Il n’est pas rare que le revenu disponible diminue de 30 à 40%. Les pertes peuvent être même plus élevées lorsque la caisse de pension comporte des lacunes, en raison par exemple d’un retrait anticipé de fonds pour financer son logement. Beaucoup de retraités entrent ainsi dans le radar de leur banque créancière car ils ne satisfont plus aux règles de viabilité. Ces dernières exigent que la charge hypothécaire et les coûts auxiliaires de la propriété n’excèdent pas un tiers du revenu. La charge hypothécaire n’est pas calculée avec les taux actuels, mais avec un taux imputé de 5%. Quant aux coûts auxiliaires, il sont estimés à 1% de la valeur immobilière. Si cette dernière est de 1,2 million de francs et si l’hypothèque s’élève à 700 000 francs, alors le couple devrait disposer d’une pension de retraite considérable, de l’ordre de 141 000 francs.
Si ce n’est pas le cas, certains instituts de crédit tiennent compte de revenus récurrents d’un éventuel portefeuille de titres existant. Mais de tels revenus n’existent pas toujours dans une mesure suffisante. Si l’institut de crédit n’accorde pas de disposition particulière, qui implique quelques sécurités supplémentaires, il ne reste souvent que deux alternatives. La première consiste à amortir l’hypothèque de manière suffisante pour que le critère de viabilité soit de nouveau satisfait. Cependant, si cela n’est pas possible ou pas souhaité car limitant trop la marge de manœuvre nécessaire en raison du manque moyens à disposition, il ne reste qu’à s’éloigner de la volonté initiale. La propriété devra être vendue pour acheter un bien moins cher ou il faudra prendre congé de l’idée d’être propriétaire et déménager dans une location.
Mais le cas contraire, celui d’une hypothèque très faible, peut aussi se révéler délicat. Beaucoup de propriétaires remboursent la majorité de l’hypothèque avant la retraite. Soit parce qu'ils n’ont pas besoin des fonds épargnés au fil du temps, soit parce qu'ils ne veulent pas investir dans des placements risqués, afin de générer des rendements plus élevés que ceux qu'ils ont à dépenser en intérêt de l'autre côté. Soit ils veulent tout simplement minimiser les obligations financières liées au bien immobilier afin de pouvoir vivre plus tard sans devoir payer de loyer.
Si des dépenses imprévues de plus grande nature surviennent (par exemple, des projets de rénovation dans la maison), ils se retrouvent souvent dans une impasse, car la banque ne veut pas relever l’hypothèque à nouveau. Cela échoue soit en raison des règles de viabilité, soit en raison de la retenue générale dont font preuve de nombreux instituts lorsqu'il s'agit d'accorder des hypothèques aux seniors. Mais il existe ici aussi des moyens d’éviter la vente immobilière contrainte.
Hypothèques pour retraités
Les hypothèques spécialement conçues pour les retraités constituent une solution, comme l’offrent la Bank Sparhafen, la Banque cantonale de Bâle-Campagne, la Bank Zimmerberg ou le Vermögenszentrum. Elles permettent d’augmenter l’hypothèque jusqu’à une limite de 50% de la valeur du bien immobilier, sans avoir à surveiller la viabilité. Cela est rendu possible par la relégation des intérêts produits sur un compte bloqué pour la durée de l’hypothèque, excluant à l’avance le risque de manque de viabilité. Si les prix de l’immobilier augmentent sensiblement, une nouvelle marge de manœuvre existe le cas échéant.
Une deuxième solution prévoit la vente du bien: l’acheteur accorde aux actuels propriétaires un droit d'habitation inscrit au registre foncier, soit jusqu’à une date convenue, soit à vie. L’acheteur doit pour cela payer un prix nettement inférieur à celui du marché, soit en un paiement unique, soit sous forme de rente. De telles transactions sont jusqu’ici assez rares en Suisse, mais on constate une demande croissante.
Souvent, ces problèmes surviennent parce que les propriétaires fonciers pensent trop tard à la planification de la retraite. Selon Daniel Ruppen, responsable des opérations hypothécaires pour les clients fortunés d'UBS Suisse, il n'est jamais trop tôt pour s'en occuper. Certains conseillers abordent ce sujet avec leurs clients seulement quelques années avant leur retraite. Ensuite il reste peu de temps pour combler les lacunes financières qui les attendent.
Daniel Ruppen recommande de s’atteler à une telle planification dès 40 ou 45 ans. Le triangle entre l’hypothèque, la caisse de pension et les actifs liquides crée souvent une valeur ajoutée considérable dans des cas individuels. À titre d'exemple, il mentionne une augmentation temporaire de l'hypothèque afin de combler les lacunes de la caisse de pension avec les fonds supplémentaires générés. Cela pourrait entraîner une économie d’impôt non négligeable et une amélioration de la situation de prévoyance.
En plus de l'approche précoce des questions financières, il faudrait également veiller à ce que la propriété soit adéquate, c'est-à-dire adaptée à l’âge des occupants. En plus des exigences structurelles telles que l'accessibilité, un grand ascenseur ou de grands espaces de stationnement convenant aux fauteuils roulants, l'accessibilité aux transports publics et aux commerces, etc. sont également à prendre en compte. Tout bien considéré, le foyer devient la forteresse désirée qui contribue en partie à de vieux jours tranquilles.
Avec l'aimable autorisation du Neue Zürcher Zeitung. Traduit par UBS Switzerland Marketing Translation Services.